Talon d’Achille

Les rails se sont dérobés sous nos pas. Je voudrais coller mon oreille sur l’ancienne ligne de chemin de fer pour entendre un train imaginaire. C’est ici un peu la High line, version mayennaise. La ligne n’existe plus depuis quelques années, terminus Château-Gontier. C’est devenu sommaire : une simple allée pour la promenade. Mais, c’est ici, au milieu de la ville traversant rocades, longeant le lycée Curie et sa propre aire de compostage, le cimetière en jardin mandala que je me penche sur une achillée millefolium, en fleur, blanche parmi l’herbe grasse.
Ces achillées blanches que j’arrache à tour de main, désespéré d’en limiter la propagation au jardin. Pourtant ici, son caractère sauvage et résistant me séduit. Si la variété type pousse si bien chez moi, pourquoi ne pas en profiter davantage en plantant d’autres variétés botaniques ? Le jardin accueille déjà l’Achillea millefolium ‘Golden Plate’ à la floraison jaune d’or, au feuillage si bien découpé et odorant, aromatique. Placée d’abord sous le petit massif du pommier, elle a intégré il y a plus d’un an un autre massif où elle s’est faite malheureusement plus discrète. Cependant, je ne désespère pas de sa robustesse, sans doute va-t-elle cet été reprendre du poil de la bête ! J’apprécie ses longues tiges florales pour en faire des bouquets de fleurs séchées. Ses fleurs forment un joli plateau. La plante peut devenir vite envahissante.
Cependant, malgré un sol qui semble bien accueillant pour les achillées, je me refuse encore à en planter, et ce malgré leurs caractères tout à fait naturels. Le résultat d’une déception amoureuse ! Oui, en effet, ayant planté la variété ‘Paprika’, achetée vulgairement à Jardiland dans un godet, je me suis retrouvé bien déçu quand la floraison promise –intensément écarlate- fut venue, ou plutôt : ne fut pas venue ! Paprika avait tourné au sel de Guérande ! La floraison était tout bonnement blanche comme celle de l’ancienne ligne de chemin de fer de Château-Gontier. Depuis j’ignore les achillées.
Plutôt, j’ignorais les achillées, jusqu’à aujourd’hui…