Bientôt… A l’école du Maître !

A l’heure où je vous écris, les Jardins des Calipso s’endorment avec une pelouse tondue, des massifs désherbés et paillés en partie. Les poissons sont toujours aussi nombreux. D’après Benoît, cela ne cesse d’augmenter : à le croire, on en aurait 100 ! Pour sûr, les mulots pullulent eux. Enfin, pendant une semaine, ils auront champ libre. Les Jardins de Calipso vont oublier pendant quelques jours notre présence, humaine.

Le blog sera lui aussi quelques temps en sommeil. Mais à notre retour, des paysages, des idées nouvelles ( ?), des anecdotes, des rencontres (avec le Maître !?) s’inscriront je l’espère dans notre nouvelle rubrique : Carnet de voyage.

On connait la destination. On ne connait pas toujours ce que nous réserve le parcours. Demain, à cinq heures du matin, nous ferons notre rentrée, à l’école d’un voyage qui devrait former bien plus que notre jeunesse ! Bientôt…  nous ferons refleurir des bulbes de tulipes sous terre ! Bientôt… nous soufflerons sur les ailes de moulins à vent ! Bientôt… nous boirons tous les canaux jusqu’au Port ! Bientôt…  nous peindrons la terre de Veermer, de Mondrian ! Bientôt… nous rêverons au milieu des vagues fleuries du jardin du Maître.

Les Brèves – 22 août 2014 : Mais que fait la chatte de ma voisine ?

Chassez les mulots, ils reviennent au galop. A la récolte des pommes de terre (Rose de France je crois), j’ai mis en fuite pas mal de petites bébêtes. Le potager est un gruyère de galerie. C’est une invasion de mulots.

J’ai même exterminé une nurserie.

Les années passées, j’avais quelques trous de ci de là. Sans doute, y avait-il assez de prédateurs naturels pour réguler tout ce petit monde-là : une chouette (que j’entendais parfois en effet…avant !),  une couleuvre (?),  les chats… Pourtant, la chatte des voisins vient souvent dans le jardin. Sauf, il est vrai, quand la chienne la fait déguerpir.

Mais alors que faire ? Les petites bestioles ont sérieusement attaqué le potager. Les haricots sont grignotés, il en va de même des pommes de terre qui se retrouvent comme des coquilles vides. Apparemment, c’est une lutte sans merci qu’il faut mener. Déjà, nous avions les taupes… Maintenant, les mulots ! Eh oui nous jardinons au naturel ! La faune apprécie. Nous leur donnons leur pain quotidien. Alors comment cohabiter ? Prier sainte mère la Chouette pour qu’elle fasse une apparition ? Reprendre un chat serait la solution, mais dans la chaine des prédateurs l’automobile est championne toute catégorie ! Alors il va falloir en passer par la guillotine ! Il existe des pièges à mulots assez radicaux, disons tranchants ! Des têtes à petites z’oreilles vont tomber.

Dans un premier temps, pour les déloger, on pourra user de notre fameux purin d’ortie, laissé macérer plus longtemps. La décoction servant de répulsif, versée dans les galeries. Autre désagrément pour leurs petits museaux, avoir à proximité du potager un sureau. S’il faut planter, nous planterons donc. La guillotine attendra encore un peu… quoique !

Thalictrum : la plante qu’il vous faut !

Ils sont naturels par excellence. Certaines espèces sont même protégées. Les Thalictrum sont des plantes indigènes en France. Le Thalictrum flavum acquis lors de notre visite au Jardin Plume en est le parfait exemple. Benoit et moi avons été surpris de découvrir alors un Thalictrum à floraison jaune et planté en plein soleil, supportant apparemment un terrain sec.

Nous nous sommes intéressés aux Thalictrum depuis la découverte d’un sujet chez Daoust Horticulture (Pépinières du Champ Fleuri), ressemblant fortement par son feuillage à une ancolie : le  Thalictrum aquilegifolium ‘Purpureum’. Puis, à Courson, nous en avons vus partout ! Comme la plante star, la plante qu’il vous faut ! Nous sommes revenus avec l’espèce delavayi et la variété ‘Splendide’. C’est une plante haute comme je les aime.

Le Thalictrum delavayi ‘Splendide’ peut atteindre 2m de haut. Il fleurit en un nuage vaporeux avec une multitude de petites fleurs mauves. Comme nombre de Thalictrum, il préfère un sol frais et l’ombre légère. Il n’aime cependant pas avoir les pieds dans une humidité trop permanente. Malgré sa hauteur, il ne nécessite pas forcément de tuteur s’il est planté parmi d’autres vivaces ou arbustes.

Le Thalictrum flavum a une floraison jaune aux allures de mimosa. C’est un sujet à réserver en fond de massif en raison de sa taille, pourtant celui-ci ne plie pas sous le vent et la pluie. Il peut avoir un bon développement dans une terre ordinaire grâce à ses rhizomes. De quoi envahir très vite nos jardins, élue plante de l’année jusqu’à la prochaine intronisation… via Courson !

Jardin Plume : Le coupeur de roseaux

Il prend à pleine brassée la longue tignasse et la coupe au plus ras. Le geste est grossier et presque mécanique. Dans la brume matinale, il lève la tête sur les carrés de hautes graminées. Derrière lui, les tas du fauchage s’élèvent. Les alignements et les symétries sont parfaits. Plus il avance vers le fond du verger, moins il distingue la frontière. La limite est une simple clôture de barbelés qui s’efface au fur et à mesure. Ses yeux confondent alors le dedans et le dehors. Il est au milieu d’un carré, sécateur dans une main. Il coupe. Mais la prairie est là, derrière le barbelé, prête à se fondre.

Tout est posé. Une perfection qui pourrait déranger. Des fauteuils de ci de là comme dans un musée. Parfois un peu trop impersonnel pour que le miroir posé dans l’alignement des carrés « sauvages » du verger ne reflète l’âme des lieux et de ceux qui l’habitent. Cependant, comment ne pas être tentés d’y emprisonner notre reflet, simples passants que nous sommes. Maîtriser l’indomptable. Tel est sans doute le souci de cet homme aux ciseaux agenouillé redessinant les bords d’un carré, coupant le gazon net. C’est ce jardinier que l’on s’imagine en coupeur de roseaux, tiraillé entre le dedans et le dehors.

Ici au Jardin Plume, on a décidé d’enfermer la Nature. Le foisonnement naturel des plantes vivaces et des graminées est à l’intérieur du carcan classique. La liberté, serait-ce celle que l’on nous prend ? Et la beauté dans ces plantes qui tentent de s’échapper… De la demeure (présence humaine par excellence) au fin fond du verger, les carrés dessinés à la tondeuse sont de plus en plus abandonnés à la Nature. Les plus proches de l’habitation étant davantage plantés par la main de l’homme et les plus éloignés laissés plus naturels, effaçant ainsi la frontière avec la prairie derrière le fil barbelé. Cephalaria, Allium, Geraniums vivaces et bien d’autres participent à la naturalisation des carrés.

Le verger est un peu un fil conducteur, un passage que le coupeur de roseaux traverse. Autour s’organisent différents jardins sous l’emprise du temps : le jardin d’été près de la maison qui surplombe le verger avec ses couleurs chaudes du jaune au rouge en passant par l’orangé (Hémérocalles, Kniphofia, Dalhia…), le jardin de printemps avec les Astrantia et Ancolies, le jardin d’automne avec des plantes hautes (pour se replonger dans l’enfance). Jardin que nous aurions aimé, Benoit et moi, voir dans son épanouissement avec ses Asters, ses Anémones du Japon, Cimicifuga et Herbes aux diamants entre autres. Autrement le jardin de fleurs, dans l’ancien potager clôturé par des échalas de châtaignier et un mur d’une petite dépendance en ruine avec sa fenêtre encore debout, emprisonne dans une nature débordante et exhubérante : les plantations en ligne rappelant l’ancien potager sont mises à mal, pour le plaisir des yeux, par les semis spontanés de Nigelle, d’Oenothères ou de pavots. La notion du temps est alors perdue. Bercés par la matrice. A l’opposé, retraversant par le miroir d’eau, des haies sculptées en ailerons de manière très contemporaine accueillent dans un cocon le jardin plume, en dehors du temps.Une broderie rappelant la cathédrale de Rouen non loin de là. Intemporel, le jardin dans le jardin. Le jardinier en semble exclu : le cœur de la matrice, le fil rompu. Emportés ailleurs, vide par son silence et plein par son mouvement. Les masses de Calamagrotis ‘Karl Foester’, des Veronicastrum , des Thalictrum ‘Splendide’ et des Sanguisorba tenuifolia ‘Alba’ respirent. Le souffle coupé.

Y a-t-il autre chose de l’autre côté ? Marcher un instant sur les lames de bois où se découpe un autre petit bassin au milieu d’un cloitre fermé par des Miscanthus. Court-circuiter. Il faut reprendre le sous-bois éclairé comme un vortex de sa lumière blanche provenant des grands Epilobium blancs (angustifolium ‘Album’) au doux parfum, mellifère. Coupure.

A l’automne, le coupeur de roseaux viendra s’aiguiser l’œil, partager le réel de l’iréel, le dedans du dehors. Chercher la frontière par-dessus la rousseur des Panicum.

Le jardin plume

Fothergilla major ‘Blue Shadow’ : une ombre bleue au tableau

Les autoroutes des vacances sont chargées. Au même moment, la petite route des Pépinières du Champ Fleuri (Daoust Horticulture) est bien déserte ! C’est justement la bonne époque (non pas pour les plantations) mais pour faire du tourisme de repérage ! Sans achats !

Je suis ressorti avec un arbuste…

D’ailleurs, on m’a regardé étrangement à la sortie puisque cet arbuste n’a aucun intérêt (ou presque) à cette saison ! Il est juste en feuilles. J’ai eu un coup de cœur pour le descriptif de ce Fothergilla major ‘Blue Shadow’. Il a plusieurs attraits : d’abord son feuillage qui se pare de jaune-orange-rouge en automne, puis sa floraison en goupillons blanc-crème est légèrement parfumée au printemps. Il préfère un terrain frais, humifère. Encore un arbuste qu’il nous faudra arroser ! Et lui donner une terre acide (type terre de bruyère) et un bon compost. La taille s’effectue de février à avril avant la floraison.

Il vaut mieux, d’après mon pépiniériste, lui donner une exposition mi-ombre afin que cette nouvelle variété aux feuilles ovales bleues acier soit renforcée. Il y a peu je me faisais une remarque comme un rêve de vacances : avoir un arbuste ou un arbre bleu (autre qu’une floraison bleue), c’est désormais chose faite avec cette découverte, une petite merveille, le Fothergilla major ‘Blue Shadow’. Pas l’ombre d’un doute dans le bleu du ciel…

(photographie issue d’internet)

Couper or not couper ?

Tel fut mon dilemme il y a quelques temps au jardin. Un jardin de vivaces a quelque chose de contradictoire : l’éphémère. Certaines ont de longues floraisons, d’autres plus succinctes. Faut-il tailler les fleurs fanées pour forcer une remontée ou laisser le côté cramoisi de la fleur pour son esthétisme et son graphisme ?

Ne pas couper les fleurs fanées, c’est également s’assurer un semis spontané chez certaines espèces. Laisser les fleurs globuleuses des Alliums par exemple, c’est permettre au bulbe de ne pas s’épuiser et de rentrer en phase de réserve. Une fleur non coupée épuise la plante ? Pas si convaincu par cet argument puisque l’on force la plante à refleurir une fois ses inflorescences fanées retirées. Dans la nature, la plante fleurit pour polleniser. Elle a donc atteint son objectif et fait son cycle. On sait que voir les fruits décoratifs sur certains rosiers après floraison n’est pas si désagréable.

Néanmoins, une taille après floraison est conseillée sur certains sujets afin de nettoyer la plante et obtenir l’année suivante une plante vaillante qui refleurira à coup sûr. Tailler après la floraison, c’est éviter bien des désagréments !

Il y a donc deux écoles : ceux qui taillent les fleurs fanées pour faire refleurir et ne pas épuiser la plante, et ceux qui, comme Piet Oudolf et la Dutch Wave dans les jardins dits « Naturalistes », préfèrent voir en fin d’été et automne des inflorescences cramoisies de vivaces au milieu de graminées. L’intérêt étant pour ces seconds de garder un certain graphisme dans les massifs le plus tard possible. Ainsi éviter le vide laissé par certaines vivaces.

Nous ferons partis, par conséquent, de la troisième ! Nous laisserons certainement « cramoisir » des vivaces tels que Echinacea, Crambe, Verbana bonariensis, Helenium, Aster, Lupinus, Persicaria, Eupatorium, Angelica Gigas (si elle se décide de fleurir !), Echinops. Par contre, je vais tailler les fleurs de fenouil pour éviter trop de semis, les fleurs de rosiers remontants. Je vais tenter de faire refleurir la Salvia nemerosa ‘Caradonna’. J’ai déjà coupé les fleurs de l’Euphorbia characias, celles de la Digitale après qu’elle ait grainé. Heuchères, je coupe, Hémérocalles je coupe. Bref, je fais un mix des deux théories. Tout en espérant garder un jardin avec un intérêt visuel même en automne, rempli de vivaces… belles dans leur mortalité.